Le filin Fil d’information en santé environnementale

Le rôle des maires dans la lutte contre la prolifération du moustique tigre

Les enjeux sanitaires et environnementaux :

Aujourd’hui en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, 62 % des communes sont colonisées par le moustique tigre et 97 % de la population vit à son contact. Les virus de la dengue, du chikungunya et du Zika circulent dans de nombreuses zones touristiques intertropicales. Aussi, toutes les conditions, sont réunies, pour craindre le développement d’un cycle local de transmission viral d’ampleur (cas autochtones) à la faveur de retours de voyages de personnes infectées (cas importés),

Afin d’éviter une épidémie de ces maladies vectorielles, l’Agence régionale de santé met en œuvre des mesures visant à identifier les cas importés et à les protéger, à informer la population des gestes simples permettant de limiter la présence de moustique tigre (destruction des gites larvaires) et d’éviter la transmission vectorielle par élimination du moustique tigre autour d’un cas (traitements larvicides et adulticides ciblés).

Si les traitements adulticides, diligentés par l’ARS au titre de la Lutte Anti-Vectorielle (LAV), sont l’outil indispensable contre le développement d’une épidémie par l’élimination des vecteurs dans l’environnement proche (150 m) d’un cas importé, la réglementation européenne et la législation française sur l’utilisation des produits biocides n’autorisent leurs recours qu’à un nombre très restreint de situations et avec un nombre limité de substances actives adulticides.

Or, le principal biocide utilisé dans le cadre de la LAV (lutte sanitaire) est aussi celui qui peut être utilisé contre les nuisances (lutte de confort) générées par la prolifération des moustiques.

Ainsi, face à des épisodes de prolifération accrue des moustiques, le recours à des opérations de désinsectisation en dehors du cadre réglementaire est à éviter pour les raisons suivantes :

- L’efficacité de ce type d’opérations est trop limitée dans le temps (15 jours maximum).

Si les gites larvaires restent en place, le moustique reviendra très rapidement à sa densité de population avant traitement.

- Les agences nationales ont identifié un risque significatif de développement de la résistance biologique des moustiques à ces produits. Il existe donc un enjeu de santé publique de préservation de l’efficacité des produits autorisés dans le cadre de la Lutte anti vectorielle

- Les concentrations utilisées par les sociétés 3D sont nettement plus élevées que celles utilisées pour la lutte sanitaire et représentent une source d’exposition de la population à des produits biocides,

- De plus, ces produits étant peu sélectifs, ils se révèlent toxiques pour de nombreuses espèces, en particulier les insectes, et sont à l’origine d’impacts environnementaux négatifs durables sur la chaîne alimentaire et sur le fonctionnement des écosystèmes.

La lutte contre le moustique doit donc s’appuyer avant tout sur des actions simples et durables d’élimination physique des gîtes. À ce titre, le législateur a donné aux Maires, au titre de leurs pouvoirs de police, des moyens d’intervenir pour le confort des usagers et dans la lutte contre les nuisances liées aux insectes vecteurs. Ces dispositions viennent en appui des mesures sanitaires conférées aux ARS et aux Préfets.

Quel est le cadre réglementaire applicable ?

L’article R1331-13 du code de la santé publique confère au maire, la possibilité d’informer la population sur les mesures préventives pour prévenir l'implantation et le développement d'insectes vecteurs, parmi lesquels le moustique tigre, sur le territoire communal.

L’article L. 2213-31 du code général des collectivités territoriales invite le maire à mettre en place dans les zones urbanisées un programme de repérage, de traitement et de contrôle des sites publics susceptibles de faciliter le développement des insectes vecteurs ; et intégrer, au sein du plan communal de sauvegarde, un volet relatif à la lutte anti-vectorielle en cas d'épidémies de maladie vectorielle en déclinant le dispositif ORSEC départemental.

Les articles 36, 37 et 121 du règlement sanitaire départemental permet au maire de prescrire aux propriétaires de terrains bâtis ou non bâtis, les mesures nécessaires pour lutter contre l'insalubrité que constitue le développement des insectes vecteurs dans les zones urbanisées (accumulation de déchets, défaut d’entretien de propriétés privée et/ou de piscine).

Que faire concrètement ?

Mettre en place un programme communal de lutte contre les gîtes de moustiques :

La désignation d’un référent technique, chargé de veiller et de participer à la mise en œuvre des actions de lutte contre la prolifération du moustique tigre que vous déploierez sur le territoire communal est une étape clé. Il sera l’interlocuteur privilégié des habitants dans le cadre des actions d’information et de mobilisation sociale sur le moustique tigre, des administrations dans le cadre de la mise en œuvre éventuelle de mesures de lutte anti vectorielle sur la commune, et pourra assurer le suivi des actions de lutte contre la présence de gîtes sur l’espace public communal.

Réaliser un diagnostic communal de présence de gîtes amovibles et inamovibles de moustiques :

Cette action consiste à identifier, sur la commune ou sur certains quartiers pour lesquels la nuisance a été repérée, l’ensemble des gîtes de moustiques présents. A l’issue de l’action, vous devrez disposer d’une cartographie des gîtes amovibles (pouvant être détruits) et des gîtes inamovibles (nécessitant un traitement et un suivi régulier), et de recommandations associées. Ces recommandations peuvent comprendre :

- Une sensibilisation et mobilisation sociale des habitants pour leur permettre d’acquérir les gestes citoyens permettant de réduire voire éliminer les gîtes de moustiques dans leurs jardins, sur leur terrasse/balcon (dispositif de récupération d’eau de pluie non couvert, mobilier de jardin, jeux d’enfants, soucoupes et pots inutilisés etc..).

- La destruction des gîtes amovibles présents sur l’espace public communal (entretien régulier des ouvrages d’évacuation des eaux usées, élimination de tous les objets pouvant mener à une stagnation d’eau : poubelles non vidées, déchets accumulés sur la voie publique tels que gobelets, canettes et bouteilles vides, canoés et barques abandonnés à proximité de cours d’eau etc.).

- La mise en place d’un programme de traitement et de suivi des gîtes inamovibles présents sur l’espace public communal tels que les regards EDF, TELECOMS, etc. pour lesquels la mise en place de solution de traitement de type produits larvicides ou supports textiles biodégradables imprégnés d’un larvicide sélectif (Bti).

Pour en savoir plus : 

Des kits de communications pour les collectivités sont disponibles sur le site de l’ARS : https://www.paca.ars.sante.fr/lutte-anti-vectorielle-prevention-contre-les-maladies-transmises-par-les-moustiques-tigres

Que faire pour aller plus loin ?

- Mettre en place une obligation dans le règlement du PLU de votre commune afin d’éviter la prolifération de moustiques liée aux eaux stagnantes dans les équipements et constructions : le règlement peut édicter des prescriptions techniques permettant d’interdire ou d’encadrer la conception de certains ouvrages.

- Favoriser l’implantation, dans les espaces verts, d’espèces végétales locales nécessitant peu d’arrosage et/ou dont les essences ne favoriseront pas la prolifération des moustiques.

- Favoriser la mise en place d’actions ludiques et pédagogiques dans les écoles et centres de loisirs communaux, en lien avec les enseignants, les éducateurs et animateurs afin de faire des jeunes citoyens des ambassadeurs des connaissances et des bonnes pratiques de lutte contre les moustiques au sein de leurs familles.

Un kit pédagogique de lutte contre le moustique tigre à destination des 9-15 ans est disponible sur l’adresse : https://www.mouskit.org/

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